Les coulombiers comme celui de Gruson ou « coulombiers
à pied », construits entièrement en briques ou en pierres du haut
en bas, étaient, avant la Révolution, le privilège des seigneurs haut
justiciers ou ayant censives et possédant au moins 50 arpents de
terre. Ce privilège était si important qu’à Gruson il donna son nom
au fief lui-même.
Au fait, la petite noblesse ne pouvait posséder qu’une
« fuie » ou pigeonnier construit sur piliers de bois.
Le décret du 4 août 1789 abolit « le droit
exclusif » des fuies et des colombiers (il y en avait 42.000 en
France à cette époque).
Le vilain, qui se permettait jadis de tuer un pigeon
était frappé d’une forte amende.
La conservation du « Coulombier », véritable
monument historique de Gruson, témoin d’un âge qui n’est plus et de
privilèges disparus depuis cent cinquante ans, est d’une absolue
nécessité, pour le pittoresque historique du village : il dira aux
générations qui viennent une page non des moins curieuses de notre
histoire locale.
La Bergerie de la cense du Coulornbier date de 1764,
la grande grange de 1767.
Au-dessus de la porte cochère se trouve un écu en
losange (ce qui indique la propriété d’une demoiselle) surmonté d’une
couronne de comte avec millésime 1760.
En 1728, ce fief appartenait à l’aîné des fils
du comte de Corroy, Joseph-Ignace de Nassau.
Plus tard, il passa entre les mains de
Joseph-Chrétien-Michel-Anaclet Le Maistre, écuyer seigneur d’Anstaing,
Gruson, La Hamayde, Eplechin, Le Brefay, qui s’intitule aussi seigneur
du Coulombier. Il est décédé à Lille le 25 novembre 1748.
Son épouse Isabelle Jacobs dame de Willems, le Frénoy, Robigeux, la
Haute Anglée, etc., est décédée à Lille, le 14 avril 1785. Tous deux
furent inhumés eu l’église d’Anstaing. Nous les avons vus plus haut.
Après avoir subi les vicissitudes de la Révolution,
le Coulombier devint la propriété de la famille de Guémy. Émile
de Guémy, juge au tribunal de Lille, le laissa en héritage à son
neveu, M. de Froissy, qui le vendit en 1926 à
Mademoiselle Desreumaux, de Roubaix.
« Le Chemin du Coulombier » ou chemin de
Gruson à Bouvines, aboutit au « Chemin de la Justice ».
« Là, dit M. le chanoine Bataille, dans
son Histoire sur Cysoing, se trouvait un fief de 41 bonniers XIII cens.
C’est dans l’intersection du Chemin de Cysoing à Bouvines et du
Chemin de la Justice que se trouvait le lieu patibulaire, où la Justice
à III piliers de Cysoing qu’on appelait aussi les
« Fourques ». C’est là que le « pendeur » de
Lille exécutait les criminels condamnés à mort par la Justice de
Cysoing ».
Lorsqu’en 1825, Jean-Joseph Despatures
devint censier du Coulombier, il succédait à X. Plancq, son beau-frère.
Après lui, habitèrent l’importante ferme : Louis
Despatures-Chuffart, Charles Despatures-Waymel, Germain Despatures-Buisset...
La culture aujourd’hui comprend 22 hectares.
La famille Despatures est originaire de Marcq-en-Barœul :
elle donna à l’Église un évêque missionnaire.
A Gruson, le 4 juillet 1873, naquit Maurice-Benoit
Despatures, à qui la Providence réservait une noble carrière.
Après de sérieuses études au Collège Notre-Dame de la Tombe, à Kain,
le jeune Maurice entra au séminaire des Missions étrangères à Paris,
en septembre 1892.
Le 26 juin 1897, il fut ordonné prêtre. Le 27 août
suivant, il partit pour l’Hindoustan, s’initia à la vie apostolique d’abord
à Kolar Goldfields, ensuite à Shimoga. Bientôt, ses supérieurs voyant
en lui un sujet d’élite, le nommèrent administrateur du district de
Chickmagahur et le placèrent dans le courant de 1903 à la tête de l’importante
paroisse de Mysore.
Mais Dieu destinait notre missionnaire grusonnois à
une plus haute mission : le 28 octobre 1922, en la Cathédrale
Saint-Patrice, de Bangalore (Hindoustan), le R. P. Maurice-Benoît
Despatures recevait la consécration épiscopale des mains de Mgr Pisani,
délégué apostolique, assisté de N.N. S.S. Roy et Chapuis, évêques de
Coimbatore et de Kumbakonan : il était nomme évêque de Mysore, il
allait avoir de quoi exercer son zèle.
Le diocèse de Mysore comprend un vaste territoire de
l’État indien dont la population approche six millions d’habitants.
Sa Grandeur eut à s’occuper de l’organisation de
ce nouveau diocèse. Elle dut construire la cathédrale, le séminaire, l’évêché
etc.
Elle eut la consolation de voir son ministère
fécond : des sympathies inattendues lui vinrent de toutes parts.
Nous lisons dans le Bulletin de la Société des
Missions étrangères que le 28 octobre 1933, le Maharadjah de Mysore,
païen, sectateur de l’hindouisme, a posé solennellement la première
pierre d’une nouvelle église dédiée à sainte Philomène. « Venu
avec toute la pompe officielle, entouré de toute sa cour, reçu par Mgr
Despatures, le souverain prononça une allocution étonnante dans la
bouche d’un païen. Puis Mgr Despatures procéda à la bénédiction de
la première pierre et cette cérémonie fil une impression profonde sur
le maharadjah et son entourage qui, pour la première fois, avaient sous
leurs yeux un aperçu des grandeurs de la liturgie catholique ».